24 mars 2013

Philyra. Extrait 1/1

Comme convenu, voici les premières lignes de "Philyra", nouvelle parue dans ArtBook Raconté, et qui remonte aux origines du monde.

Si la chose t'intéresse, le ton du narrateur s'inspire de Duras époque Ravissement de Lol V. Stein.

Quant à l'image, c'est une sculpture du Bernin récemment aperçue à Rome.


Cela se passa au temps où les Muses n'inspiraient pas encore les hommes.

Ouranos, le Ciel, et Gaïa, la Terre, venaient de se séparer et le temps s'infiltrait entre eux. Nourrisson, il n'avançait qu'à une allure paresseuse. L'espace aussi commençait à peine à s'étirer.

Parmi les enfants d'Ouranos et Gaïa, ceux que l'on appelle les Titans, on comptait Océan et Téthys. Le frère et la sœur se marièrent. Parmi les Océanides, ils eurent une fille qu'ils nommèrent Philyra.

Voilà ce que je sais.

Ce que je sais encore, c'est que Philyra vécut sur l'île qui se trouve à l'entrée du Pont-Euxin et qui porte aujourd'hui son nom.

Je l'imagine comme un amas de rochers brunis par le soleil, plantée de quelques arbres pour y cacher sa solitude. Car Philyra était seule. Ses parents n'avaient guère le temps de s'occuper de toutes les Océanides. Il y en avait des milliers.

Océan entourait le monde de sa masse immense. Au gré des courants, il se déplaçait le long des côtes pour saluer les fleuves ses fils, il remontait parfois les cours d'eau pour visiter ses filles, les sources et rivières. Mais jamais il ne s'attardait plus de quelques instants. Le cours des choses rapidement le reprenait et il repartait dans sa tournée sans fin.

Quant à Téthys, elle demeurait le plus souvent au pays des Hespérides, là où, chaque soir, le Soleil achève sa course. Elle ne se déplaçait guère.

Philyra donc était seule. Je veux le croire.

Elle passait sa vie à attendre en regardant les flots indifférents qui bordaient ses rivages.

Cronos vint.

Quelle force le conduisit ici ? Quel hasard le guida ? Avait-il entendu parler de cette fille au doux chant qui patientait sans cesse ?

Image : source www.galleriaborghese.it, Apollon et Daphné du Bernin.

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Un extrait très entraînant, et une illustration parfaitement choisie avec Apollon et Daphné
Toutes les félicitations d'une ancienne élève de Courcouronnes pour votre carrière littéraire
- Anha -

CLAVELUS a dit…

Merci, Anha. J'espère que cela te rappellera les cours de latin en les complétant.