25 juillet 2011

Une aventure de Don Juan. Extrait


Comme d'habitude, je te livre l'incipit (pour parler sérieux) de la nouvelle parue dans De capes et d'esprits 2 aux éditions Rivière Blanche.

Cette histoire peut se lire à la fois comme une préquelle et une suite de
L'Antilégende. C'est toi qui choisis.


— Sganarelle !

D'immenses tentures rouges tombaient devant le regard et ondulaient à la manière d'une mer verticale. Une main gantée repoussa vainement le velours.

— Sganarelle ! insista la voix.

— Monsieur !

— Où es-tu, maître sot ?

— Je suis là, Monsieur.

Le valet rejoignit enfin son maître. Grand, élancé, Don Juan dominait de toute sa hauteur le domestique courtaud.

— Aurais-tu l'amabilité de me dire où nous sommes ?

— Monsieur, je ne le sais pas mieux que vous.

— La peste soit de ces draperies ! Je n'en vois pas le bout.

Sganarelle se mit à réfléchir, tandis que son maître explorait les pans de tissu écarlate. Il retrouva quelques sensations : ses souliers étaient humides, une odeur de soufre flottait dans l'air et l'on entendait au loin sonner le carillon d'une horloge.

— J'ai souvenir d'une statue, murmura-t-il en frissonnant. Celle du Commandeur que vous tuâtes il y a six mois.

— Et pourquoi craindre ? Ne l'ai-je pas bien tué ?

— Je me rappelle un spectre…

— Crois-tu à ces sortes de sornettes ?

— Eh bien…

Le valet baissa la tête sous le regard flamboyant de Don Juan.

— Non, Monsieur, nous nous moquons bien de cela, nous autres.

— À la bonne heure ! Mais tout en raisonnant, je crois que nous nous sommes égarés. Je ne trouve point d'issue à ce rideau.

Avant que Sganarelle ait pu protester, son maître avait dégainé son épée et, malgré le manque de recul, avait fendu le velours dans le sens de la hauteur. L'obscurité parut.

— Ah, Monsieur, nous sommes en enfer ! Je vous avais prévenu : les libertins ne font jamais une bonne fin.

— Paix ! Je n'aime pas les faiseurs de remontrances. Nous ne nous trouvons pas en enfer.

— Au purgatoire alors ? fit le valet avec un espoir renaissant.

Image : source Wikipedia, rideau du théâtre de Neuburg an der Donau.

2 commentaires:

Charlotte Bousquet a dit…

Je ne l'avais pas vue, cette entrée!
Raison de plus pour acheter l'antho quand j'aurais de nouveau des sous

CLAVELUS a dit…

Tu me diras quand tu auras lu la nouvelle. C'est vraiment fait pour boucler la boucle de l'Antilégende.