25 octobre 2013

Quand les clowns en treillis font gémir la musique. Extrait 1/1

Voici le début de la nouvelle pour l'anthologie Virus qui vient de paraître chez Griffe d'Encre. 

Comme beaucoup de mes textes, cette histoire est née d'un bout d'une chanson de Thiéfaine qui lui a donné son titre, tiré de "542 lunes et 7 jours environ" sur l'album Chroniques bluesymentales.


Approche, fiston…

Viens, je te dis…

Il faut que je te parle aujourd'hui. Le sujet est important, la matière grandiose. Je vais te raconter la période la plus noire de notre histoire, le fond du gouffre dans lequel notre pays a trébuché.

Je reviens quelques années en arrière…

En ce temps-là, les choses allaient plutôt bien. On se dirigeait pas à pas vers la fin du premier mandat du président Felkay. Un sacré coco, celui-là ! Il avait annoncé la couleur : « Vous allez en prendre pour votre grade et je n'oublierai personne en route ! »

Le Felkay, il n'a laissé personne en rade. Les pauvres, les chômeurs, les hôpitaux, l'école, l'armée, les tribunaux, les patrons. Il a tout bousculé ! Un tremblement de terre ! Panique dans les dortoirs… On ne sait plus où donner de la tête… Ça va trop vite… Certains se planquent la tête sous l'oreiller... Double dose de Prozac pour tout le monde ! C'est sa tournée, au petit père…

Et puis les résultats pleuvent. L'horizon se dégage. On se déleste d'une partie des poids morts et la montgolfière s'élève à la conquête de nouveaux mondes. Une fois les boulets détachés, on retrouve sa souplesse de jadis, sa légèreté. On vole. On a vingt ans. C'est l'euphorie… Ça renâcle un peu dans les écuries mais on garde le cap… Le public tremble sur ses fondations, il se fait banquise, les icebergs fondent au fur et à mesure. Ça se craquelle : le Titanic ? Non. Les compteurs se remettent en marche avant et jouent les brise-glace. On sort des zones de turbulence. Le sortant est réélu dans un fauteuil plus confortable encore que le premier et il y assoit son postérieur plus profond. Il aime quand ça sent le cuir et que ça brille…

Les mécontents, les fâchés ont beau s'y mettre tous ensemble, la rébellion toussote. On lui file des granules et au lit ! Le murmure s'éteint comme un moteur dans la nuit et les ronflements reprennent, les vannes s'inversent pour faire repartir la pompe à fric. On crie au Messie : le nabot génial ouvre en deux la marée d'embêtements qui avait englué les précédents. On sort du désert. Enfoncé, Pharaon ! Ça recommençait à sentir l'aisance satisfaite, l'oseille conquérante et belle, des parfums de bonheur en tube revenaient nous chatouiller les naseaux.

Et là, c'est le coup de mou…

Une déveine pas possible… La tuile, la vraie…

Tu dois t'en souvenir, même si tu étais tout petit. Comme un fait exprès, une épidémie s'est déclenchée. Pas de la peste noire, non, ni même le choléra ou le sida… Du petit, du mesquin. On a cru qu'on pourrait cacher l'information. Les médias étaient déjà aux ordres, il n'y avait qu'à lever un sourcil et ils vendaient leur mère, le doigt sur la couture du pantalon. Alors on a enterré, on a tu, on a effacé.

Ça n'a pas duré.

Image : source Wikipédia, Achille Zavatta en 1974, © Claude Truong-Ngoc / Wikimedia Commons

24 octobre 2013

Bienvenue en Pandémie

Depuis la semaine dernier, tu peux trouver l'anthologie Virus, parue aux éditions Griffe d'Encre, et dont le titre parle de lui-même. Au côté de quelques autres, j'apparais au sommaire avec une nouvelle intitulée "Quand les clowns en treillis font gémir la musique" (merci Thiéfaine, une fois de plus).

Comment des clowns en treillis peuvent-ils avoir le moindre rapport avec des virus ? Tu le sauras en lisant la nouvelle dont l’écriture remonte à près de deux ans, l'achèvement de l'anthologie ayant été un long processus.

En tout cas, tu as déjà deux critiques sur l'ouvrage chez Les histoires de Lullaby ainsi que chez Par delà les montagnes hallucinantes. Je te proposerai tantôt le début de la nouvelle pour que tu t'en fasses une idée plus précise.

En attendant, profite de la belle couverture de Zariel.